Bientôt, la « FÊTE DU SPORT ET DE LA CULTURE » de L’Isle-Jourdain va nous revoir grillant sous le soleil de septembre, entourés des stands des autres représentants de la vie associative lisloise. Parés de nos T-shirts d’un resplendissant jaune bouton d’or, nous distribuerons sourires, flyers et conseils à tous les aspirants ludovores ou simples promeneurs curieux.
« Connaissez-vous le monde merveilleux du jeu de société ?« …
Quand on me répond « Je ne suis pas joueur/joueuse. Je n’aime pas jouer.« , il m’arrive de répliquer : « Vous ne savez peut-être quel type de joueur/joueuse vous êtes !« .
Les non-initiés imaginent souvent le jeu de société cantonné au Jeu de l’Oie, Jeu des 7 familles ou à l’interminable Monopoly. Les plus branchés de ces néophytes évoqueront les Mille Bornes, le Uno, voire le Docteur Maboul. Que nenni !
Le jeu de société, c’est, chaque année, plus de 2000 nouveautés dans les boutiques spécialisées (4 ou 5 sur Toulouse) et une pléthorique variété.
Permettons-nous, ici, un aperçu succinct – plus de 1000 références à L’En-Jeux – de l’inventivité des créateurs de jeux.
Quoi de neuf ?
Dans l’univers du jeu de société, comme dans celui des cocktails, il y a les classiques, les inventions qui restent et peuvent devenir des classiques. Et il y a tout le reste : des copies, des clones ou des recombinaisons plus ou moins heureuses, voire opportunistes ; les éditeurs tentant de répéter une réussite (commercialement parlant !) en s’inspirant d’un aspect innovant… trouvé par d’autres.
Les recombinaisons sont des ingrédients déjà éprouvés auparavant mélangés selon des harmonies nouvelles – dosages et compositions.
Les bonnes surprises, rares, proviennent de saveurs inédites. Parce qu’il y a un « truc en plus », un petit je-ne-sais-quoi « différent », un décalage.
Sortis des sempiternels Cluedo (un chef-d’œuvre, au demeurant), Mille bornes, Uno (pompage éhonté du vieux « 8 américain« ), Monopoly et autres Croque Carotte pour les petits ou La Bonne Paye (toujours demandé), voici un florilège non limitatif et purement subjectif des jeux qui m’ont paru innover. De ceux devant lesquels on se dit « Waow, c’est nouveau, ça !« .
En passant, citons les précurseurs qui ont remis les jeux de plateau sur les rails du succès populaire avec l’ingrédient qui fait la différence. Comme les Colons de Catane (1995) – devenu Catan (pour cause de bien-pensance saugrenue, « Bouh, la colonisation !« ) -, Dominion (père du mécanisme de « deckbuilding » – 2009), Agricola (pour le « placement d’ouvriers » – 2009) etc.
Malheureusement, depuis quelques salons du jeu d’Essen, la nouveauté est devenue timorée. Au contraire d’une offre « marketée » de plus en plus agressive – on croule sur des (pseudo) nouveautés sans intérêt ou, au mieux, qui ne proposent que des « ok-games ». Un « ok-game » est un jeu qui fonctionne correctement, qui aurait pu faire un tabac commercial s’il était apparu il y a quinze ou vingt ans, mais qui sent le réchauffé et n’apporte rien le faisant sortir du lot.
Innovation ludiques
Donc, par ordre anté-chronologique, je commencerai par le dernier prétendant apparu sur mon podium des jeux-qui-ont-quelque-chose-qui-interpellent-le-joueur-blasé ; pour les intimes, le podium des JQOQCQILJB (vérifiez s’il manque une initiale !)
Kites (2022), découvert au dernier festival Alchimie de Toulouse, est un petit jeu d’ambiance coopératif de défausse dans lequel, des fous rires nerveux ponctuent ce « contre la montre » – contre LES montres, plutôt – utilisant avec astuce l’emploi de 6 sabliers qu’il faut sans cesse retourner pour éviter la défaite dans laquelle le vidage de l’un d’entre eux précipitera les joueurs.
(Pas encore dans les armoires de L’En-Jeux ?)
Micro-Macro Crime City (As d’Or 2020), et ses enquêtes visuelles mâtinées de la carte géante d’une ville foisonnante de personnages façon Où est Charlie ? et pourrie de crimes divers qu’il conviendra d’élucider.
The Mind (2019). Pas vraiment un « jeu de règle ». Plutôt une expérience ludique singulière. Si un jeu est une mise en situation, un contexte, suscitant parmi les participants une série d’émotions – simplement, si c’est « prenant » -, alors The Mind mérite un peu d’attention. Un de ces OLNI (Objets Ludiques Non Identifiés) qui apparaissent, fugitifs, dans un paysage saturé de propositions plus ou moins frelatées.
(Pas encore dans les armoires de L’En-Jeux ?)
The Crew (2019). Jeu de plis à difficulté progressive avec son mécanisme éculé, mais… en mode « coopératif« . Et ça change tout. Il fallait y penser ! (As d’Or 2020)
Unlock! (2017)
Sans doute déclencheur d’un genre en plein boom : les escape games. Réussite, issue d’une idée simple comme un coup de génie, d’une tentative de reproduire avec un simple paquet de cartes (et une application pour smartphone) le frisson d’une escape room.
(La quinzaine des boîtes éditées à ce jour sont disponibles à L’En-Jeux)
Magic Maze (2017)
Un coopératif qui se joue en simultané (pas de « tour de jeu »), avec rapidité (sablier !), où l’on ne parle que lorsqu’on s’arrête de déplacer les personnages sur un plateau découvert petit à petit. De l’observation et de la coordination pour réussir à atteindre les objectifs – de plus en plus complexes à mesure que progresse l’aventure – et ressortir à temps.
CodeNames (2015-2016), en coopération, équipe contre équipe, réussir à faire associer entre eux des mots, parmi les 25 tirés au hasard pour la partie, en ayant pour indice le mot-indice proposé par un partenaire.
Et son challenger, peut-être plus chafouin : Decrypto (2018) qui, sans avoir l’élégante simplicité de son probable inspirateur paru deux ans auparavant, apporte une dimension supplémentaire au jeu de devinette par association d’idées avec le plaisir sadique de trouver des indices qui jetteront les adversaires dans la confusion.
Colt Express (2014)
Sympathique jeu de baston un peu foutraque de programmation d’action d’attaque d’un train du Far West – en vrai 3D sur maquette cartonnée ! – pris d’assaut par les desperados qu’incarnent les joueurs. Sorte d’avatar du déjà ancien mais toujours jouissif « RoboRallye » (1996).
Splendor (2014). L’inattendue bombe commerciale qui a lancé les Space Cowboys, également éditeur des Unlock!.
Initiateur des jeux de type engine building* – *construction progressive d’un « moteur » qui permet d’accélérer, plus que les concurrents, son approche de la victoire.
Quelques successeurs à la mécanique centrale similaire et disponibles aussi à L’En-Jeux : Century (3 boîtes combinables – 2017…), Chakras (2019) et Ganymede (2018), entre autres.
Hanabi (2010). Chef d’œuvre du jeu coopératif. Ce jeu (« petit ») de déduction et de communication, avec guère plus qu’un paquet de cartes, a généré un engouement mondial dû à sa simplicité de règle et sa « courbe de progression » impressionnante – au point que des sites internet, des articles et études à foison y sont consacrés.
Il y s’agit de jouer ses cartes judicieusement en ne voyant que les cartes des autres joueurs.
J’avoue mon addiction à ce bijou – plusieurs milliers de parties à mon actif. Si (Oh que j’ai honte !).
Dixit (2010)
Un jeu plutôt « cerveau droit » où, s’inspirant de superbes illustrations fantastiques, il faudra faire deviner quelle carte correspond à l’indice donné. Cet indice sera suffisamment parlant pour qu’au moins un joueur la trouve, mais pas trop pour éviter de faire progresser les concurrents. Simple. Original.
Pas de « mécanisme » dans ce beau jeu d’imagination et de déduction intuitive, assez unique – même si son éditeur tente, avec plus ou moins de bonheur depuis, de renouveler cette réussite avec, par exemple, un Mysterium (2016) tout à fait recommandable.
Les Loups-Garous de Thiercelieux (2002)
Jeu d’ambiance pour groupe conséquent de 6 à 24 joueurs, à mi-chemin entre un jeu de rôle (rôles cachés) et des jeux de déduction comme le Cluedo. Des loups-garous se cachent parmi les villageois qu’ils éliminent les uns après les autres, en veillant à ne pas être découverts et éliminés à leur tour. De la tchatche, du bluff, des discussions… Gros succès chez les ados (et pas que) !
Carcassonne (2000)
Parangon des jeux de « pose de tuile » et inventeur du terme « meeple » (contraction de « my people ») désignant les fameux pions en bois en forme de personnage très schématique. Un classique aux multiples extensions… et descendants, de La Guerre des Moutons (2003) à Small Islands (2018).
Et bien sûr les vénérables Times Up! (2006), Abalone (1989) etc.
Et j’oublie sciemment la catégorie pourtant incontournable des Jeux de Rôle ; pour certains, le jeu absolu, car, n’ayant d’autre limite que l’imagination des participants qui « jouent » un personnage comme un acteur (pas sur des planches mais autour d’une table avec quelques dés pour simuler les aléas – oui, c’est étymologiquement redondant, je sais – de la vie). La grande aventure par excellence !
Section Jeux de Rôle très active à L’En-Jeux – renseignez-vous !